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RÉGLEMENTATION PROFESSIONNELLE – RC des professions réglementées

Décision de la première chambre civile de la Cour de Cassation du 12 juin 2014, n°13-16.309,

La décision revient sur la question des obligations du notaire lors d’une donation de parts sociales d’une société dont un des associés est décédé.

Dans ce contexte, le notaire doit notamment :vérifier l’identité ou les droits des personnes qui se présentent devant lui. Cette obligation alimente un contentieux de la responsabilité fréquent, dont l’issue n’est pas toujours favorable à la clientèle des études.
L’arrêt de la première chambre civile commenté rejette le recours en responsabilité intenté par les membres d’une famille déchirée.

Trois personnes constituent une société civile immobilière. L’opération est marquée d’une certaine singularité puisque les associés sont une femme, son mari et l’un de leurs sept enfants, les deux parents s’attribuant la quasi-intégralité des parts sociales. La disparition du père survient et, dans le respect des statuts de la société, la mère et le fils décident d’attribuer l’usufruit des parts du défunt à la première, leur nue-propriété revenant à la société puis, un peu plus tard, au second. Finalement, la veuve alors âgée de 90 ans sollicite le concours de son notaire afin de faire don à son associé de l’ensemble de ses parts détenues dans la SCI.

La donation, évaluée à un montant avoisinant 150 000 euros, suscite après coup la frustration des autres membres de la fratrie qui découvrent, au décès de leur mère, que les parts sociales de cette dernière ont disparu de la masse successorale. Ils estiment alors avoir été lésés et s’en prennent au notaire dont ils recherchent la responsabilité.
Les requérants n’obtiennent pas gain de cause devant les juges du fond. Ils restent néanmoins convaincus que le fait pour des époux, unis sous le régime de communauté réduite aux acquêts, de se porter ensemble acquéreurs de parts sociales a pour effet de faire entrer automatiquement ces parts dans la communauté.Détenus de façon indivise à la suite du décès de leur père, ces titres n’ont pu dès lors faire l’objet d’une donation à la seule initiative de leur mère.
Ils soumettent leur analyse à la Cour de cassation  qui rejette, à la suite des premiers juges, le recours des héritiers.

Elle rappelle que :

  • la dissolution de la communauté matrimoniale, la qualité d’associé attachée à des parts sociales non négociables dépendante celle-ci, ne tombe pas dans l’indivision post-communautaire qui n’en recueille que leur valeur, de sorte que le conjoint associé peut transmettre son titre sans recueillir l’accord de ses coïndivisaires »
  • Le droit spécial des sociétés impose ici sa logique aux règles applicables aux régimes matrimoniaux et aux successions et, s’agissant du notaire, au droit de la responsabilité. Dans les sociétés de personnes, la part sociale ne peut être transmise librement. La transmission obéit à des modalités particulières, généralement définies dans les statuts ou dans la loi. La part sociale d’une société civile immobilière se trouve comme protégée et la Cour de cassation fait jouer cette protection jusque dans la mise en œuvre du régime matrimonial et du droit des successions. Tout se passe comme si, en l’espèce, le statut de l’associée primait celui de l’épouse. Avec cette conséquence que les parts sociales ne peuvent être considérées comme tombant, du seul fait de la liquidation du régime matrimonial, dans l’actif successoral à partager.

Par conséquent, en application du droit des sociétés,  le notaire n’avait pas à consulter et à obtenir le consentement préalable de ces derniers. Il n’a donc commis aucune faute susceptible de justifier sa responsabilité