Le démembrement de titres de sociétés : usufruit ou quasi-usufruit.
22/01/2018 | L'avis de l'expert
22/01/2018 | L'avis de l'expert
Pas de panique, démembrer la propriété d’un patrimoine n’a pas pour objectif de saccager ce dernier mais uniquement de séparer entre plusieurs personnes les attributs du propriétaire d’un actif. On parle d’usufruitier lorsque le personne possède un droit de jouissance sur un actif patrimonial, ainsi que le droit d’en percevoir les revenus. La personne qui conserve le droit de disposer de celui-ci (le donner, le vendre, le détruire) est appelée nu-propriétaire.
Traditionnellement, on distingue l’usufruit d’un quasi-usufruit, qui résulte d’un démembrement de propriété portant sur un actif dont l’usage entraîne sa disparition. La pratique a cependant admis qu’un quasi-usufruit puisse être prévu sur des biens normalement non consomptibles et notamment sur des titres de sociétés.
En 2017, plusieurs utilisations du quasi-usufruit sur titres de sociétés ont été validées, constituant une bonne nouvelle pour les réflexions patrimoniales à mener en 2018. Ainsi, dans un arrêt du 10 février 2017, le Conseil d’Etat a rejeté le caractère fictif imputé à une donation-partage de la nue-propriété de titres de sociétés avec stipulation qu’en cas de vente des titres une partie du prix reviendrait au donateur. L’administration fiscale a tenté de démontrer que les sommes sur lesquelles portaient le quasi-usufruit n’ont pas été réellement données par les parents, la preuve en résultant selon elle de l’absence de constitution d’une garantie de la créance de restitution. Pour la haute juridiction, l’opération s’est réalisée en deux étapes : une donation de la nue-propriété de titres, suivie de l’institution d’un quasi-usufruit conventionnel sur une somme d’argent. Elle valide donc la licéité du quasi-usufruit conventionnel sur une somme d’argent, ce même si aucune garantie n’a été prévue.
Dans un arrêt du 10 mars 2017, le Conseil d’Etat est allé encore plus loin. En l’espèce, des parents ont consenti une donation de la nue-propriété de titres à leurs enfants avec report de leur usufruit sur le prix de cession puis sur les biens acquis en réemploi en cas de cession concomitante de l’usufruit et de la nue-propriété des titres. Les titres sont cédés et une convention, signée pour la souscription de contrats de capitalisation en démembrement, réitère la condition de réemploi prévue par la donation. Pour le service de l’usufruit, des rachats partiels sont mis en place. Le montant du capital investi diminue. Le Conseil d’état en conclut que les usufruitiers exercent un quasi-usufruit sur les sommes placées et restent redevables à l’égard du nu-propriétaire d’une obligation de restitution.
Ces arrêts sont importants car, s’adaptant à la réalité économique moderne, le Conseil d’Etat assouplit ainsi sa jurisprudence exprimée notamment dans un arrêt du 14 octobre 2015, où il avait été déclaré fictive une donation de titres de sociétés avec réserve d’usufruit suivie d’une convention de quasi-usufruit permettant au donataire de s’accaparer le prix de cession.
Intéressante sur le plan de l’organisation patrimoniale, cette nouvelle donne judiciaire doit néanmoins conduire à une application pratique vigilante. Une analyse par trop hâtive consisterait à considérer la constatation d’un quasi-usufruit sur le prix de vente comme inéluctablement plus favorable. Des écueils persistent. L’appui d’un professionnel du droit et de la fiscalité est indispensable pour faire le bon choix et rédiger la convention de quasi-usufruit. Les questions sont en effet nombreuses à résoudre :
Sur le plan fiscal, les questions foisonnent également. Dans un arrêt du 11 mai 2017, le Conseil d’Etat a admis la possibilité pour le nu-propriétaire de déduire de sa plus-value les frais acquittés pour l’acquisition de l’usufruit alors qu’il est le seul à être redevable de l’impôt sur la plus-value. Une même logique sera-t-elle applicable en cas de quasi-usufruit ?
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