CONTRÔLE FISCAL : LA SÉCURITÉ DU CONTRIBUABLE FRAGILISÉE PAR LE NOUVEL ABUS DE DROIT
30/01/2019 | L'avis de l'expert
30/01/2019 | L'avis de l'expert
L’intégration dans l’arsenal des outils répressifs à disposition de l’administration fiscale d’un nouveau dispositif d’abus de droit a fait couler beaucoup d’encre et ce bien avant son application prévue pour 2020. L’attention générale focalisée sur ce sujet, une jurisprudence très alarmante de la Cour d’Appel de Paris du 20 décembre 2018 est passée inaperçue. Elle fragilise, un pilier des droits de la défense du contribuable, ni plus ni moins que le droit de se prévaloir de la garantie de la doctrine antérieure de l’administration fiscale, ainsi que l’y autorise l’article 80 A du Livre de Procédure Fiscale.
A partir du 1er janvier 2020, l’administration fiscale aura à sa disposition un dispositif à deux étages pour sanctionner l’utilisation abusive de la loi fiscale.
Demain, figurera donc à côté de l’abus fiscal pour fraude à la loi ou fictivité de l’opération menée, un nouveau dispositif applicable aux opérations à but principalement fiscal.
Que dit ce nouveau texte ?
Si le contribuable :
avec comme objectif principal d’échapper à l’impôt ou de le réduire considérablement, l’administration fiscale pourra donner à l’acte concernée sa véritable qualification juridique et ainsi taxer l’effectivité de l’opération réalisée.
Nombre de professionnels du patrimoine, se sont émus du risque de voir remis en cause les opérations de transmissions anticipées de patrimoine avec réserve d’usufruit. L’Administration fiscale a rapidement mis un terme à la polémique, en précisant dans un communiqué de presse que ces opérations ne seraient pas concernées par la procédure déjà désignée sous le nom de mini abus de droit.
Une surprise, bien évidemment non la loi, elle-même, favorise la transmission de propriété démembrée, comment alors envisager de qualifiée l’opération menée d’abus de droit, sauf bien évidemment si la transmission est fictive.
A l’avenir les opérations de donation-cession, d’apports cession, de filiation à l’étranger devront avoir une efficacité économique primant sur l’intérêt fiscal des opérations. Il est peut-être temps pour les professionnels de ne plus proposer des montages patrimoniaux s’apparentant à des produits de défiscalisation.
La prudence est de se faire accompagner d’un avocat fiscaliste averti qui saura vous recommander un modus operandi conforme au cadre réglementaire et vous conseiller sur l’opportunité d’une procédure de rescrit.
Cette prudence est d’autant plus de mise qu’un arrêt du 20 décembre 2018 de la cour administrative d’appel de Paris vient encore complexifier la défense d’un contribuable en portant atteinte à un pilier du contentieux fiscal : la garantie contre les changements de doctrine.
Dans une décision du 20 décembre 2018 n° 17PA00747, la cour administrative d’appel de Paris, vient en effet de remettre en cause la protection absolue offert par l’article L 80 A du LPF aux contribuables, en jugeant que la situation fiscale du contribuable, qui a appliqué à la lettre une doctrine administrative, peut néanmoins être redressée pour abus de droit.
En l’espèce, le dirigeant de la société Marie-Clarence, cède les parts de l’entreprise qu’il détient à la société B lors de son départ à la retraite. Il applique un abattement de 100 % € sur la plus-value réalisée, mais l’administration fiscale conteste son droit à bénéficier de l’abattement sur le fondement de l’abus de droit.
Il faut préciser que lorsque comme en l’espèce, les titres sont cédés à une société, le cédant ne doit pas posséder plus d’un 1% du capital de l’acheteur. Or, pour répondre à cette exigence, le contribuable concerné a avant son départ à la retraite, vendu les parts qu’il détenait dans le capital de l’acheteur à une SCI, dont il est devenu concomitamment le gérant.
La même société civile rachètera après son départ à la retraite, l’ensemble des actions du capital de l’acheteur et le contribuable l’ensemble des parts de la SCI.
L’objectif recherché par le montage : descendre en dessous de la fraction du capital de l’acheteur à ne pas dépasser pour pouvoir bénéficier de l’abattement comme le précise l’instruction fiscale commentant l’article 150-0-D du Code Général des impôts.
L’administration fiscale ne l’étend pas de cette oreille, assimilant l’instruction fiscale à une décision, elle ouvre une procédure d’abus de droit. Elle estime en effet que le contribuable a fait une application littérale de l’instruction fiscale mais en ayant recours à un montage fictif. Elle conclut alors à un abus de droit, comme l’y autorise l’article L64 du Livre de Procédure Fiscale.
La Cour d’appel administrative de Paris, n’hésitera pas, à prendre le contre-pieds total de la Jurisprudence du Conseil d’Etat , rendu pourtant en assemblée contentieuse dans le célèbre arrêt dit des fonds Turbo , qui excluait la possibilité de recourir à l’application de l’article 64 du Livre de Procédure Fiscale, au nom de la garantie contre le changement de doctrine si le contribuable avait fait application des conditions visées par une instruction fiscale.
Elle ne semble même pas prendre la peine de solliciter son avis.
Cette première brèche dans la garantie offerte au contribuable, si elle devait se confirmer, est inquiétante. On rappellera en effet que l’application littérale d’une décision, est aussi une des conditions permettant l’ouverture de la nouvelle procédure d’abus de droit.
Face à cette évolution, la prudence est de mise. Nous ne pouvons que recommander de vous entourer pour des opérations non standards de l’avis de professionnels du droit et de la fiscalité.
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