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L’assurance-vie : un outil de transmission moderne au cadre juridique complexe.

L’assurance-vie est l’instrument de transmission par excellence. Bien au-delà de son cadre juridique fiscal avantageux régulièrement mis en avant dans la presse, elle permet en effet une grande créativité en matière d’organisation de la transmission du patrimoine de son détenteur à des personnes extérieures au strict cadre de la législation sur la succession. Cette faculté est souvent source de litige lorsque le choix du souscripteur du contrat d’assurance se heurte à l’incompréhension des héritiers désignés par la loi.

C’est un conflit de cette nature qui, le 14 décembre 2017, fut soumis à la Cour de Cassation. Madame Stéphanie X. avait souscrit un contrat d’assurance-vie à adhésion facultative dont elle avait rédigé la clause bénéficiaire en ces termes : « Mon conjoint, à défaut mes enfants nés ou à naître, vivants ou représentés, à défaut mes héritiers ».

Lors du décès de la souscriptrice, le capital décès exigible est censé être partagé entre les héritiers de la défunte mais naît un conflit entre les héritiers légaux de la défunte et une association caritative qu’elle a instituée légataire universel de sa succession ultérieurement à la signature de son contrat d’assurance-vie. Les héritiers légaux soutiennent que le capital décès doit leur être attribué car la clause bénéficiaire doit être interprétée à la date de la désignation, conformément aux dispositions du Code Civil.

La Cour de Cassation ne suit pas cette argumentation. Selon elle, Il ne suffit pas, afin de déterminer les bénéficiaires, de se référer uniquement à la notion juridique d’héritiers ou à celle employée dans le langage courant. Il faut, à la date d’exigibilité du contrat, procéder à l’interprétation de la volonté du souscripteur.

Dans le cas pratique, les faits démontraient la volonté du souscripteur de faire profiter à l’association caritative désignée du capital du contrat d’assurance-vie.

La morale de cette histoire est sans ambiguïté : n’est pas toujours héritier qui s’en prévaut.

C’est une autre mauvaise surprise que la première chambre civile de la Cour de Cassation devait réserver à l’héritière du souscripteur d’un contrat d’assurance-vie, dans un arrêt du 7 février 2018 (pourvoi ° 17-1088). Pendant de nombreuses années, la caisse d’assurance vieillesse a versé à Monsieur P. une allocation de solidarité à raison de son handicap. Celui-ci était par ailleurs souscripteur d’un contrat d’assurance-vie au profit de quatre bénéficiaires, A son décès, la caisse de retraite sollicite le remboursement de l’allocation versée : elle requiert auprès du juge la réintégration dans la succession des primes versées sur le contrat d’assurance-vie, considérant qu’elles étaient exagérées au regard des actifs du souscripteur/ assuré.

L’une des héritières, bénéficiaire du contrat d’assurance-vie, s’y oppose, mettant en avant que les primes versées ne peuvent être qualifiées d’exagérées dans la mesure où la souscription du contrat d’assurance-vie a été autorisée par un juge des tutelles.
Dans son arrêt du 7 février 2018, la Cour de Cassation ne retiendra pas cet argument. Selon elle, la mission d’un juge des tutelles se limite en effet à analyser si le contrat d’assurance proposé a ou non un intérêt pour le majeur sous tutelle. Il ne lui appartenait pas de se préoccuper, le cas échéant, du caractère exagéré des primes versées au regard du patrimoine de la personne placée sous protection de justice.

Ces décisions attestent si, cela était encore nécessaire, que le placement préféré des français est régi par un cadre juridique complexe nécessitant une spécialisation particulière.

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